La guerre en Ukraine est un stress test pour la chaîne alimentaire

06.04.2022

Depuis le début de la pandémie, les entreprises alimentaires belges sont confrontées à une pénurie de matières premières et à des coûts qui atteignent des niveaux records. En 2021, le secteur semblait pourtant se redresser économiquement, mais la guerre en Ukraine agit comme accélérateur de feu et fait qu’il n’est plus rentable pour 30 % des entreprises alimentaires de poursuivre leur production. Une enquête menée auprès des 700 membres de Fevia montre qu’aujourd’hui, l’approvisionnement de la moitié des entreprises alimentaires est perturbé et que 70 % d’entre elles doivent adapter la composition de leurs produits ou devront le faire prochainement. 4 entreprises sur 10 indiquent qu'elles pourraient temporairement suspendre ou réduire leur production dans les semaines à venir. Fevia demande donc aux autorités et aux clients de nos entreprises un soutien urgent et une certaine flexibilité afin que la chaîne alimentaire puisse continuer à tourner.

Reprise économique en 2021, mais la guerre ravive les flammes

Après que la pandémie a aussi frappé durement l’industrie alimentaire en 2020, les chiffres économiques de 2021 montrent que l’industrie alimentaire s’est redressée l’année dernière, en partie grâce aux mesures de soutien des autorités. L’industrie alimentaire a confirmé son rôle de moteur économique avec une reprise par rapport à l’année corona de 2020 : un chiffre d’affaires de 61,4 milliards d’euros (+13,1 %), 1,9 milliard d’investissements (+9,2 %), 30 milliards d’euros d’exportations (+11,7 %) et 97 966 emplois (+2,4 %).

Cependant, un chiffre menace aujourd’hui de ruiner le secteur : la rentabilité des entreprises alimentaires belges est tombée à un niveau historiquement bas de 2,8 %. Anthony Botelberge, président de Fevia, prévient : « Pendant la pandémie, de nombreuses entreprises alimentaires étaient déjà au pied du mur en raison des pénuries de matières premières et de la forte augmentation des coûts des matières premières, de l’énergie, des emballages et du transport. En début d’année, il semblait que nous allions enfin pouvoir éteindre ces flammes, mais la guerre en Ukraine a, malheureusement, à nouveau attisé le feu. Si nous ne pouvons pas répercuter ces coûts, il ne sera plus rentable de poursuivre la production. »

La hausse des prix dans les magasins est inévitable

Selon une nouvelle enquête menée auprès des membres de Fevia, 9 % des entreprises alimentaires belges ont réduit leur production au cours des dernières semaines et 30 % prévoient de le faire prochainement. Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, les perturbations mondiales de la chaîne d’approvisionnement et les mauvaises récoltes ont entraîné une hausse de 43 % du prix des matières premières en un an et demi.

La guerre en Ukraine fait grimper ces coûts encore plus haut. Par exemple, le prix du blé a augmenté de plus de 50 % depuis le début de la guerre. « Malheureusement, nous constatons toujours que les grandes chaînes de supermarchés ne sont guère ouvertes à la discussion sur les augmentations de prix, qui sont pourtant inévitables », déclare Bart Buysse, CEO de Fevia.

« Heureusement, après des mois de concertation, un premier signal commun de la concertation de la chaîne belge est finalement arrivé lundi dernier. C’est une chose positive de constater que les organisations de la concertation de la chaîne, y compris la fédération du commerce Comeos, appellent les acteurs de la chaîne à partager de manière équitable l’impact des augmentations de coûts, mais nous devons encore voir comment ils vont appliquer cela en pratique. Cela démontre également le besoin urgent de leviers dans la réglementation garantissant que les contrats et les prix puissent être ajustés plus rapidement en temps de crise, en cas d’augmentation imprévue et considérable des coûts. »

L’industrie alimentaire étant un secteur à forte intensité énergétique, la hausse explosive des prix de l’énergie a un impact majeur : la moitié des entreprises alimentaires ont vu leur facture d’électricité au moins doubler en un an et 37 % ont même vu leur facture de gaz tripler. Fevia demande aux autorités de prendre rapidement des mesures temporaires, en plus des mesures structurelles, afin de modérer la facture énergétique des entreprises alimentaires belges et, surtout, de ne pas créer de charges ou d’obligations supplémentaires en ce moment.

Pénurie de matières premières et d’emballages

La guerre en Ukraine menace de provoquer des pénuries de différentes matières premières. Ainsi, les raffineries d'huiles végétales de l'Union européenne s'approvisionnent en Ukraine pour 35 à 45 % de l'huile de tournesol consommée dans l'UE. Les fabricants de produits préparés à base de pommes de terre et de légumes, de plats préparés, de margarines et de minarines, de sauces, de pâte à tartiner au chocolat, de céréales petit-déjeuner et de produits de pâtisserie, ainsi que de nutrition médicale et d’aliments pour bébés, se précipitent désormais pour trouver des solutions alternatives, qui sont évidemment beaucoup plus coûteuses.

En outre, les fabricants de pain et de produits de boulangerie, de pâtes et de biscuits, qui utilisent la farine blanche et la farine bise comme ingrédients, ressentent aussi les effets de la réduction des exportations de blé en provenance de Russie et d’Ukraine. Mais les producteurs belges sont également menacés de pénuries d’autres ingrédients, tels que l’huile de lin, le miel et les ovoproduits. Même les emballages tels que les bouteilles et les bocaux en verre risquent eux aussi de se raréfier

Besoin de soutien et de flexibilité

L’enquête menée auprès des membres de Fevia montre que la moitié des entreprises alimentaires belges sont confrontées à une rupture d’approvisionnement et que 70 % d’entre elles ont déjà dû adapter la composition des produits ou devront le faire prochainement. Anthony Botelberge, président de Fevia : « Nos entreprises vont tout faire pour continuer à garantir l’approvisionnement en nourriture, comme elles l’ont fait pendant la pandémie. Nous sommes un secteur résilient, mais dans ces circonstances exceptionnelles, nos entreprises ont besoin de soutien et de flexibilité. »

Fevia demande aux autorités de déroger temporairement à l’application stricte de la législation sur l’étiquetage. Cela permettra aux entreprises alimentaires d’utiliser rapidement des matières premières et des ingrédients de substitution pour compenser les pénuries, tout en respectant bien sûr la sécurité alimentaire.

« Nous demandons également la compréhension nécessaire de la part des clients de nos entreprises. Nous leur demandons de tenir compte de l’augmentation des coûts et de ne pas imposer de pénalités logistiques lorsque les livraisons ne peuvent pas être effectuées à temps ou sont retardées en raison de pénuries dans l’approvisionnement de nos entreprises. Cette crise est un stress test pour l’ensemble de la chaîne alimentaire. Tous les partenaires de la chaîne le reconnaissent. Dans ces circonstances extrêmement difficiles, nous ne pourrons nous en sortir qu’ensemble ! » conclut Bart Buysse, CEO de Fevia.