Le consommateur est aussi le dindon de la taxe

07.07.2023

Le Premier Ministre se réjouissait récemment du fait que notre pays a fait son entrée dans le top 20 des pays les plus compétitifs selon le classement mondial de l’institut suisse IMD. Alexander De Croo l’affirme : « On peut toujours faire mieux mais nous sommes sur la bonne voie pour que notre pays sorte renforcé de la crise. » Nous lui suggérons cependant de s’attaquer aux deux indicateurs les plus faibles en matière de compétitivité : la politique fiscale et les prix, pour lesquels la Belgique arrive respectivement en 59ième et 42ième position sur les 64 pays. Malheureusement notre pays n’en prend pas le chemin et risque de sortir rapidement du top 20 !

Tout le monde se plaint des prix alimentaires (trop) élevés. Et pourtant, les Gouvernements ont dans leurs tiroirs toutes sortes de propositions en matière de taxes et de prélèvements qui pourraient augmenter encore plus le prix du caddy dans les supermarchés. Une augmentation de la TVA (+800 millions de recettes supplémentaires), l'alourdissement de la taxe sur les emballages (+60 millions), la responsabilité des producteurs en matière de déchets sauvages (189 millions, soit cinq fois plus que chez nos pays voisins), et dernière nouveauté, l’augmentation de la taxe-soda et des taxes sur les alcools.

Rendons très concrètes ces mesures en regardant leur impact sur le prix d’une bouteille de soda d’un litre qui serait vendue à 1€ par le producteur. Aujourd’hui, les taxes indirectes portent le prix de cette bouteille chez nous à 1,29€. Chez nos voisins, qui ne connaissent pas notre lasagne de taxes, le prix de la même bouteille est de 1,19€ en Allemagne et aux Pays-Bas, 1,14€ en France et 1,03€ au Luxembourg. Et demain, nos Gouvernements pourraient faire grimper le prix de cette même bouteille en Belgique au-delà de 1,35€.

Et sans vouloir en rajouter une couche à cette lasagne indigeste, cette différence de prix part du principe que nos producteurs sont en mesure de proposer un prix de vente identique à celui de leurs concurrents étrangers. Or, avec un handicap salarial de 25% par rapport à la moyenne des 3 grands pays voisins (33% par rapport à la France !) et un coût de l’électricité également 25% plus élevé, nos entreprises partent avec une solide épine dans le pied. Vous avez dit « compétitivité » ?

 

On comprend donc aisément pourquoi les consommateurs belges se pressent de plus en plus dans les supermarchés de nos pays voisins, en particulier français. Rien qu’au 1er trimestre de cette année, ils ont dépensé 172 millions d’euros en courses alimentaires à l’étranger, dont 65% en France. Et les boissons, alcoolisées ou non, représentent un quart des achats. Si les taxes sont encore augmentées en Belgique, les achats transfrontaliers pèseront également de plus en plus lourd, non seulement sur l'activité économique et l'emploi dans l'ensemble de la chaîne agroalimentaire, mais aussi sur les recettes publiques. Alors surtout, n'imposez pas de prélèvements et de taxes supplémentaires qui rendraient à nouveau l'alimentation et donc le caddy plus chers et qui encourageraient encore plus les achats transfrontaliers.

 

Alors, Monsieur le Premier Ministre, sommes-nous vraiment sur la bonne voie ? Permettez-nous d’en douter. L’industrie alimentaire continuera à assumer ses responsabilités, que ce soit en matière environnementale ou d’approvisionnement alimentaire abordable pour le consommateur. Mais s’il-vous-plait, regardons tous dans la même direction pour que notre pays puisse viser prochainement le top 10 des pays les plus compétitifs. Nous serions tous gagnants: pouvoirs publics, entreprises et travailleurs.