Un SUP-plément de 189 millions ? Trop is te veel !

30.01.2023

Les entreprises alimentaires ne commercialisent pas seulement des aliments et des boissons, mais également des emballages de plus en plus circulaires. Nos entreprises sont depuis un certain temps très conscientes de la responsabilité qui leur incombe. Pourtant, elles se retrouvent face à encore plus de nouvelles responsabilités à cause de la nouvelle directive européenne sur les Single Use Plastics. Cette directive prévoit plusieurs mesures dont celle qui rend le producteur responsable pour les coûts liés aux déchets. La Belgique est en train de transposer la directive en Belgique via une  législation interrégionale, mais le projet qui se trouve aujourd'hui sur la table est malheureusement le résultat d'un manque de dialogue. Il n'est pas transparent, va bien au-delà de ce que l'Europe exige et débouche sur des montants hallucinants. Ann Nachtergaele, Environmental Affairs & Energy Director, expose l'énormité du projet et formule des propositions afin d’œuvrer ensemble à une véritable politique en matière de déchets sauvages.


De nos jours, nous voyons malheureusement encore trop de déchets sauvages. Et ce, malgré les nombreux efforts des citoyens et de l'industrie. Croyez-moi : les déchets sauvages sont aussi une plaie pour les entreprises alimentaires. Le secteur alimentaire veut donc passer à la vitesse supérieure dans la lutte contre les déchets sauvages. En collaboration avec Comeos et Fost Plus, nous mettons sur la table un nouveau plan intégral, sous le nom « Every packaging counts ». Le paiement des coûts des déchets sauvages en collaboration avec les communes fait partie de ce plan. Mais ce que la Belgique et ses régions proposent aujourd'hui dépasse l'entendement. Jouons ensemble au jeu des trois erreurs…

Je ne le répéterai jamais assez : aucun fabricant de produits alimentaires n'aime voir ses emballages finir dans la nature. Depuis des années, nos entreprises alimentaires prennent leur responsabilité en finançant des solutions par le biais de Fost Plus et avec les entreprises du secteur du commerce. Depuis 2016, nous mettons chaque année 17 millions d'euros sur la table pour mettre en place une politique coordonnée de lutte contre les déchets sauvages dans les trois régions.

Grâce à ce budget, Mooimakers a été créé en Flandre, BeWapp en Wallonie, et une collaboration avec la région de Bruxelles a été mise en place. Ces cellules d'expertise soutiennent, entre autres, les villes et les communes dans leurs politiques de lutte contre les déchets sauvages, par exemple par le biais d'un coaching, d'un plan d’aménagement en poubelles, de caméras, de projets de nudging, etc. De nombreuses autres actions ont également reçu un soutien financier comme des systèmes de  récompenses et des campagnes de sensibilisation dans les écoles.

Qu'attend exactement l'Europe et qu'en fait la Belgique?

La directive européenne sur les Single Use Plastics impose aux producteurs de certains emballages et autres articles en plastique bien définis de payer les coûts de nettoyage des déchets sauvages et de vidange des poubelles publiques. De cette manière, la Commission européenne veut étendre la responsabilité des producteurs en matière de recyclage et de prévention de ces emballages aux problèmes de déchets sauvages.

Actuellement, les trois régions de Belgique transposent cette directive. Malheureusement, l’industrie alimentaire a été largement mise à l'écart des discussions sur la transposition de la directive. Néanmoins, nous continuons à prendre nos responsabilités et restons prêts à payer les coûts des déchets sauvages. Mais nous rencontrons trois problèmes majeurs dans la façon dont les gouvernements de notre pays effectuent cette transposition. Et cela sans engager le dialogue avec le secteur pour trouver de vraies solutions...

Cette taxe défavorise nos entreprises

La directive européenne sur les SUP vise spécifiquement une liste d'emballages plastiques bien définis tels que les bouteilles, les gobelets ou les récipients alimentaires. Par conséquent, la plupart des pays se limitent à cette liste lorsqu'ils la transposent dans leur législation nationale. Mais pas le nôtre! Nos trois régions ont décidé d'étendre le champ d'application de la directive à tous les emballages. Et ils incluent également le secteur du chewing-gum, même s'il n'apparaît pas du tout dans la directive européenne. 

On peut parler ici de « goldplating » : notre pays impose des obligations plus lourdes que ce que prescrit l'Europe. Cela peut sembler ambitieux, mais nos propres entreprises se retrouvent alors dans une situation de concurrence déloyale par rapport à leurs homologues des autres États membres de l'Union Européenne. 

Cette taxe coûte à nos entreprises trois fois plus cher que dans les pays voisins

Selon la directive européenne, les États membres ne peuvent répercuter que les coûts nécessaires pour éliminer les déchets sauvages de manière rentable, mais les trois régions souhaitent que les producteurs soient responsables de la totalité des coûts, y compris les frais généraux. Quant à l'efficacité, elle soulève également de grandes questions. En effet, les coûts sont déterminés sur la base d'une enquête auprès des communes : notre secteur devrait simplement payer les montants qu'elles ont évalué. Mais ceux-ci sont tout simplement hallucinants : pour les emballages, cela représente la somme pharaonique de 189 millions d'euros supplémentaires ! 

Soit presque le double des cotisations que nous versons actuellement à Fost Plus pour la collecte, le tri et le recyclage de tous les emballages ménagers en verre, papier et carton et de tout ce qui se trouve dans le sac PMC. Cela revient à un coût de 16,5 euros par habitant dans notre pays. À titre de comparaison, en France, en Allemagne ou aux Pays-Bas, ce coût moyen s’élève respectivement à 3 €, 3,5 € et 5,5 € par habitant. Nous devrions donc payer au moins trois fois plus en Belgique ! 

Pour les chewing-gums, le montant est aussi complètement disproportionné : l'industrie du chewing-gum devrait payer près de 25 millions d'euros, soit plus de la moitié de son chiffre de vente en Belgique. En raison de ces coûts élevés, il n'est pratiquement plus rentable pour les producteurs de vendre des chewing-gums en Belgique... 

Le tableau ci-dessous indique les coûts que nous payons aujourd'hui et ceux que nous devrons peut-être payer demain. Allons-nous atteindre 1 milliard d’euros ? C’est démesuré !

Cette taxe n'incite pas à lutter efficacement contre les déchets sauvages

Que les choses soient claires : il s'agit purement d'introduire une nouvelle taxe. Jusqu'à présent, ni nos arguments, ni nos avis n'ont été pris en compte. C'est pourtant notre secteur qui devra payer, même si nous n'avons aucune idée de la manière dont les autorités utiliseront cet argent. Sera-t-il utilisé à bon escient pour résoudre efficacement les problèmes de déchets sauvages, ou bien les villes et les communes continueront-elles à nous envoyer la facture? Notre objectif est clair. Payer : oui, mais pour un meilleur résultat sur le terrain.

Nos propositions pour avoir ensemble un réel impact

Tout d'abord, nous demandons que les coûts soient fixés de manière transparente et en concertation avec toutes les parties concernées. De plus, nous proposons une véritable coopération entre les communes et les entreprises pour s'attaquer ensemble aux problèmes de déchets sauvages. Pas au moyen d'une taxe , mais sur la base d'une cotisation adéquate qui est vraiment basée sur des services efficaces.

Par ailleurs, nous souhaitons continuer à travailler sur une approche plus globale pour traiter les déchets à la source. D'une part, en déployant nos propres efforts pour réduire les emballages dans la mesure du possible. Pour cela, nous étudions de nouveaux business models, sans emballages ou avec des emballages réutilisables. Plus précisément, nous le faisons par le biais du Green Deal Anders Verpakt. D’autre part, nous travaillons sur l'introduction du système de consigne numérique pour les emballages de boissons et avec d'autres systèmes de récompense.

Nous demandons que le gouvernement, pour sa part, consacre encore plus d'efforts à la répression. Parce que, quoi que l'on fasse ou dise, il restera malheureusement toujours un petit groupe de personnes têtues qui le prennent par dessus la jambe. Pour ces personnes, qui partiront du principe que leurs déchets seront nettoyés et que les coûts seront assumés par l’industrie, seules les sanctions peuvent avoir un impact.

J'espère sincèrement que cet appel ne tombera pas dans l'oreille d'un sourd. Engageons le dialogue ensemble et travaillons à l'élaboration d'une politique d'emballage circulaire qui puisse résoudre efficacement les problèmes de déchets sauvages.