Encore une couche de 60 millions de plus pour la lasagne de taxes ? Non merci !

25.10.2022

Nous avions salué il y a quelques semaines l’initiative du Ministre de l’Economie d’analyser les causes des prix alimentaires plus élevés chez nous que chez les voisins. Début octobre, notre présentation à la Chambre des Représentants avait clairement montré que les coûts salariaux, les coûts énergétiques et la fiscalité indirecte nettement plus élevés en Belgique expliquent ce différentiel de prix. Et voilà qu’une semaine plus tard, le Gouvernement rajoute une couche de 60 millions d’euros à la lasagne de taxes payée en Belgique. Cherchez l’erreur !

Trop is te veel !

L’industrie alimentaire est déjà fortement mise à contribution, que ce soit via la fiscalité indirecte ou via toutes sortes de contributions dans le cadre de la gestion des emballages. Dans le cadre des négociations budgétaires 2023-2024, le gouvernement souhaite imposer une nouvelle taxe sur les emballages de 60 millions d'euros. Cela représente une augmentation de recettes de 17% sur cette taxe. Trop c’est trop !

Plus de taxes, moins d’investissements, produits plus chers ?

Aujourd’hui, 4 entreprises alimentaires sur 10 n’ont plus les réserves financières suffisantes pour résister à un prochain choc. Or, celui-ci se produira vraisemblablement dans les prochains mois, avec d’une part, une indexation des coûts salariaux de plus de 10% et d’autre part, un grand nombre d’entreprises qui passera d’un contrat d’énergie fixe à un contrat variable à des tarifs nettement plus élevés. Les entreprises alimentaires n’ont donc tout simplement pas les moyens d’absorber l’augmentation des coûts qui lui seraient imposée l’année prochaine. Deux conséquences : un, les entreprises pourraient devoir rogner sur leurs investissements ou sur leurs dépenses en recherche et développement par exemple. Ce qui n’est pas la bonne direction quand on connait tous les enjeux, notamment en matière de durabilité, qui nous attendent. Deux, une nouvelle taxe rendra nos produits inévitablement plus chers pour les consommateurs en Belgique.

Le gouvernement pousse encore plus le consommateur belge à faire ses achats à l’étranger

Or, comme la moitié des Belges vivent à moins de 50 km d’une frontière nationale, la Belgique est extrêmement vulnérable aux achats transfrontaliers. La motivation des résidents belges pour aller faire leurs courses de l’autre côté de la frontière est évidemment principalement financière. L’accumulation de taxes et de prélèvements est dès lors le principal élément déclencheur qui incite les Belges à aller faire effectuer leurs achats de l’autre côté de la frontière.

Comme l’illustre parfaitement le graphique ci-dessous dans le cas des boissons non alcoolisées, la corrélation entre fiscalité et achats transfrontaliers est particulièrement forte. Une nouvelle taxe emballage, qu’elle prenne la forme d’une augmentation du taux ou d’un élargissement de la base, va encore accentuer le phénomène.

Les effets négatifs du commerce transfrontalier pèsent lourdement sur notre économie. Les chiffres montrent que les achats transfrontaliers se limitent rarement aux boissons, et que les Belges remplissent aussi volontiers leur caddy (ou coffre de voiture) avec d'autres produits.

C’est pourquoi les achats transfrontaliers représentent une perte économique considérable pour la Belgique. En 2019, avant l’apparition de la pandémie du coronavirus, le manque à gagner fiscal avait été estimé à plus de 115 millions d’euros par an (TVA, accises et impôt sur les sociétés), montant qui, dans le contexte budgétaire actuel, serait vraiment nécessaire. De plus, ce sont une fois de plus des emplois qui partent à l’étranger ou qui ne sont pas créés en Belgique. En ce qui concerne l’industrie alimentaire et le commerce, cela ne représente pas moins de 2 700 emplois directs. De ce fait, c’est plus de 77 millions d’euros par an de cotisations de sécurité sociale et de précompte professionnel que l’Etat ne perçoit pas, rien que pour ces deux secteurs. Au total, l’Etat belge se prive donc de près de 200 millions d’euros chaque année.

Rendre les emballages plus durables peut se faire sans taxe (supplémentaire) !

Etant donné l'impact que cela aura sur les achats transfrontaliers et l'érosion supplémentaire de notre compétitivité, Fevia demande au Gouvernement de revoir sa copie budgétaire et de ne pas introduire de nouvelles taxes sur les aliments et les boissons ou augmenter les taxes existantes. En ce qui concerne la taxe sur les emballages de boissons, nous sommes prêts à travailler avec le Gouvernement afin que, comme celui-ci le souhaite, « cette cotisation d’emballage ait plus d’impact en termes de réutilisabilité, de recyclabilité et d’incidence environnementale des emballages ». Mais taxer plus les emballages est inacceptable. Il faut en effet que cette réforme s’inscrive dans le cadre des évolutions importantes au niveau régional en matière de financement des coûts liées au déchets sauvages et de l’objectif de capter 100% des emballages de boissons à usage unique.