L'Europe se dirige vers plus de durabilité : qu'est-ce que cela signifie pour les entreprises ?

31.03.2023

Le Green Deal européen place la barre plus haut pour les entreprises en matière de développement durable. C'est là qu'interviennent la CSDDD et la CSRD : deux nouvelles directives relatives à la due diligence et au rapport de durabilité, dont l'impact se fait aujourd'hui déjà sentir dans la chaîne alimentaire. Il est par conséquent logique que de nombreuses entreprises du secteur alimentaire se demandent comment faire face à cette situation. Nous sommes allés chercher des conseils et des astuces auprès d'experts de KPMG et de PwC... et nous avons découvert comment des entreprises alimentaires comme Greenyard, Food n'Joy et Vandemoortele répondent à cette situation. 

Due diligence (CSDDD of CS3D) 

La CSDDD, acronyme de « Corporate Sustainability Due Diligence Directive », se concentre sur tous les risques humains et environnementaux tout au long de la chaîne d'approvisionnement. Les crises successives ont créé un contexte économique difficile ces dernières années, mais pour rester compétitif sur le long terme en tant qu'entreprise, il ne faut pas perdre de vue l'aspect de la durabilité. 

La production de denrées alimentaires et de boissons peut également avoir des effets potentiellement négatifs sur les personnes et l'environnement. Cette directive définit la manière dont les entreprises doivent prendre en compte l'impact réel et potentiel de leurs activités sur les droits des personnes et sur l'environnement. Elles doivent les identifier, les prévenir, les atténuer et/ou les faire cesser par le biais de la CSDDD. Il va sans dire que la CSDDD est un défi majeur pour les entreprises alimentaires, mais elle offre également des opportunités commerciales et stratégiques. Chez Greenyard, ils ont relevé le défi.

Greenyard 

Puisque Greenyard achète chaque année quelque 2,6 millions de tonnes de produits provenant de plus de 90 pays, cette entreprise travaillait déjà avec des objectifs d'approvisionnement responsable qui exigeaient la certification de conformité sociale de tous les producteurs dans les pays à risque moyen et élevé. En raison d’une part de la législation en matière de due diligence en Allemagne, son principal marché, et de la collaboration dans le cadre de la Sustainability Initiative for Fruit and Vegetables (SIFAV) d'autre part, Greenyard a choisi de passer à la vitesse supérieure.

Au niveau du groupe, ils ont mis à jour leur propre code de conduite et ont entre-temps déployé un code de conduite pour les fournisseurs. Ils ont également lancé un projet pilote en interne pour élaborer concrètement les principes de due diligence de l'OCDE et développer une politique formelle de due diligence. 
Sa mise en œuvre nécessite un changement d'état d'esprit, car les opérations internes et les achats indirects sont également pris en compte. 

Que recommanderiez-vous à d'autres entreprises alimentaires ? Frédéric Rosseneu (Business Development Manager) : « Cette législation, qui bénéficie du soutien du top management, a une incidence sur la quasi-totalité des processus d'entreprise. Cela peut sembler insurmontable, mais ce qui est essentiel, c’est d'avoir un plan clair qui montre ce que l'on fait déjà aujourd'hui et ce que l'on fera à long et à moyen terme. Le réseau d'apprentissage de Fevia nous a réellement apporté une valeur ajoutée grâce à l'échange d'informations pratiques, d'obstacles, etc. dans le domaine de la législation qui était jusqu'alors relativement inconnue de tous les participants. » 

Tips & Tricks  

L'industrie alimentaire est confrontée à de nombreuses nouvelles lois, dont la CSDDD. Mais par où commencer ? Quinten Smits (Lawyer) et Hadrien Bosly (Lawyer) de PwC nous aident à nous lancer en 6 étapes ! 

Hadrien Bosly, Lawyer

Quinten Smits, Lawyer

Étape 1 : commencez par une analyse des risques 

Examinez les opérations existantes et la chaîne d'approvisionnement, et identifiez les impacts négatifs potentiels sur les droits des personnes et sur l'environnement.

Étape 2 : réévaluez le système interne, les politiques et les procédures 

Intégrez une due diligence efficace dans les politiques de l'entreprise, les systèmes de gestion et les contrôles internes afin que la directive soit respectée à l’avenir.

Étape 3 : rassemblez toutes les informations nécessaires 

Quelles sont les informations disponibles sur la gestion et la chaîne de valeur ? Et quelles sont celles qui n'ont pas encore été divulguées ?

Étape 4 : adaptez les contrats 

Pour faciliter le respect de la directive, ajoutez des dispositions dans les nouveaux contrats (par exemple, le droit de demander des informations à l'autre partie).

Étape 5 : travaillez intelligemment 

Créez des parallèles et des synergies avec les initiatives du CSRD, et facilitez le travail. 

Étape 6 : désignez des experts 

Investissez dans des employés responsables du respect de la CS3D (par exemple, une équipe ou un responsable du développement durable). Ils sont responsables du respect de la stratégie de développement durable, y compris de la CS3D et d'autres règles ESG (telles que la CSRD). 

Votre entreprise souhaite-t-elle également emprunter le chemin de la due diligence ? Laissez-vous inspirer par notre guide et notre article sur la CSDDD. 

Saviez-vous que... nous proposons un réseau d'apprentissage sur la due diligence ? Restez informé de tout ce qui se passe au sein de la CSDDD et apprenez de vos collègues et des experts. Vous trouverez plus d'informations ici

Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) 

Alors que la CSDD se focalise sur la durabilité de la chaîne d'approvisionnement d'une entreprise, la CSRD se concentre sur l'entreprise alimentaire. Dans quelle mesure l'entreprise est-elle durable ? En élaborant un rapport sur le développement durable, toute entreprise peut faire son propre état des lieux et découvrir des opportunités de croissance. Par exemple, les entreprises peuvent mieux s'aligner sur les besoins des consommateurs, investir dans leurs relations avec les fournisseurs ou améliorer la chaîne d'approvisionnement (CSDDD) : ce sont autant d'opportunités pour optimiser la stratégie et les politiques d'une entreprise grâce à la CSRD. Food n'Joy et Vandemoortele nous montrent comment cela est possible.

Food n’Joy 

Il y a dix ans, Food n'Joy a commencé à contrôler sa consommation d'énergie et d'eau. Au fil des années, ces deux critères ont été portés à dix. Aujourd'hui, l'entreprise s'appuie sur la roadmap de développement durable de Fevia pour préparer son rapport de développement durable. Les quatre piliers leur font office de boussole pour les aider à faire des choix durables et les challenger sur les efforts à fournir encore.  

Food n'Joy tire plusieurs avantages de la CSRD : en travaillant avec ses employés sur ce sujet, elle reçoit davantage de suggestions d'amélioration en interne. Grâce à son rapport sur le développement durable, elle touche également un nombre remarquablement plus important de candidats de moins de 30 ans. Dans la phase suivante, ils prévoient d'utiliser la CSRD également pour les clients et les fournisseurs. 

Que recommanderiez-vous à d'autres entreprises alimentaires ? Arnaud Bonnel (Managing Director) : « Il est plus que temps de commencer, vous allez sinon au-devant de gros problèmes ! Etablir un rapport de développement durable constitue actuellement un avantage compétitif, demain ce sera la norme. Soyez pragmatiques et débutez avec des critères simples et qui parlent à tous. Enfin, gardez un œil critique sur votre travail et sollicitez l’avis d’externes, ils vous aideront à enrichir votre démarche ». 

Vandemoortele 

Chez Vandemoortele également, on s'accorde à dire que cela vaut la peine de s'y prendre à temps. Ils ont publié leur premier rapport de développement durable en 2017 et, depuis 2020, font du rapportage selon les normes du GRI. L'année dernière, l’entreprise a publié pour la première fois un rapport annuel intégré reprenant des données financières et des données sur le développement durable, ce qui lui a valu de recevoir le Belgian Sustainability Impact Report Award. « Le développement durable fait partie intégrante de la stratégie et de la culture de notre entreprise, le choix d'un rapport intégré semble donc couler de source » (Aurélie Comhaire, Group Sustainability Manager).  

Toutefois, ils constatent eux aussi qu'il y a encore du travail : « Les chiffres relatifs au développement durable n'ont pas encore la maturité des résultats financiers. De nombreuses données sont encore collectées manuellement. Aujourd'hui, nous faisons déjà énormément de rapportage, mais avec la CSRD, cela va sans aucun doute augmenter. Notre département financier dispose d'une grande expertise en matière de rapportage automatique. Nous utiliserons d’autant plus cette expertise pour l’appliquer aux données relatives au développement durable. »  

De plus, en concertation avec leurs parties prenantes, ils ont l'intention de mettre à jour leur stratégie de développement durable sur la base de l’exercice de double matérialité (voir ci-dessous : Tips & tricks, Étape 3), une exigence de la nouvelle législation européenne sur la CSRD. Les rapports de développement durable évoluent rapidement, mais chez Vandemoortele, on évolue avec eux.

Tips & tricks 

Les entreprises qui mettent en marche dès aujourd'hui leur roadmap de conformité avec la CSRD peuvent bénéficier d’un avantage concurrentiel, et assurer ainsi leur croissance et leur rentabilité futures. Suivez la roadmap de Steven Mulkens, Executive Director, ESG Reporting & Assurance chez KPMG, pour préparer votre entreprise à la nouvelle législation CSRD.

Étape 1 : scoping analyse 

Analysez la structure du groupe pour déterminer comment et à quel niveau l'entreprise fera du rapportage. Obtenez des informations sur le niveau de rapportage le plus efficace au sein du groupe.

Étape 2 : gap analyse 

Dans quelle mesure la stratégie et les rapports de développement durable sont-ils à jour ? Identifiez les lacunes par rapport aux exigences de la CSRD en matière de rapportage, afin de créer ainsi une base sur laquelle s'appuyer. Établissez un plan clair et réaliste identifiant les sujets de durabilité qui sont négligés et les actions à entreprendre pour améliorer la qualité et l'exhaustivité des processus et des données de durabilité.​​

Steven Mulkens, Executive Director, ESG Reporting & Assurance

Étape 3 : double analyse de matérialité 

Le rapport doit traiter à la fois de la matérialité de l'impact et de la matérialité financière. En d'autres termes, il doit décrire l'impact de l'entreprise sur les questions de développement durable (inside-out) et l'impact de ces questions de développement durable sur l'entreprise (outside-in). Conseil : effectuez cette analyse dès le début pour commencer à observer les thèmes matériels de manière ciblée.

Étape 4 : rapportage transparent 

La CSRD présente des avantages évidents. Un rapportage efficace et transparent peut conduire à de nouvelles sources de financement ainsi qu’à des informations supplémentaires sur les risques et les opportunités non financières. De plus, cela peut renforcer la crédibilité et la réputation de l'entreprise, contribuant ainsi à attirer des talents sur le marché du travail et à améliorer la rétention du personnel.