À la loupe : le refill répond-il à nos attentes ?

14.11.2023

Les emballages sont précieux, mais comment les rendre encore plus circulaires ? Notre experte Candice Joseph analyse les opportunités et les écueils du refill : un nouveau business model axé sur la prévention et la réutilisation des emballages.

Bonjour Candice, peut-on se passer des emballages ?

Candice : « À cette question, je répondrai clairement et simplement : « non ». Les emballages sont d’une importance cruciale, ne serait-ce que pour garantir la sécurité alimentaire ou informer le consommateur sur un produit. Toutefois, je suis aujourd’hui convaincue que nous devons aller vers moins d’emballages et plus d’emballages circulaires.

Avec le Green Deal Anders Verpakt, une initiative de Fevia, Comeos, Detic, Vil et l’OVAM, nous recherchons ensemble des innovations et de nouveaux modèles d’entreprise en matière de prévention et de réutilisation des emballages. Et cette initiative a trouvé un large écho : une centaine de participants s'impliquent durant trois ans dans plus de quatre-vingt projets pilotes.

L’éventail de ces projets est très large : des institutions de connaissance sur les entreprises alimentaires jusqu'aux détaillants et pouvoirs publics. En tant qu'initiateurs, nous soutenons les participants en organisant des workshops et événements, en partageant des connaissances et en identifiant ensemble les obstacles potentiels. »

Comment parvenir à des emballages plus circulaires ?

Candice : « Par exemple, en investissant dans la réutilisation, comme le refill. Le refill est une solution d'emballage dans laquelle le consommateur utilise son propre emballage réutilisable pour protéger et transporter un produit. L’exemple le plus évident est une valeur sûre dans notre vie de tous les jours : la boîte à tartines. En utilisant ce type de contenant, le consommateur a la responsabilité de nettoyer et de remplir lui-même son emballage.  

Mais le refill, c’est bien plus que cela. Saviez-vous qu'il existe des systèmes où le consommateur ne doit plus se charger de l’entretien ?

Les emballages réutilisables sont d’abord nettoyés par un opérateur externe dans une station de lavage, avant d’être remplis sur le site de production, au supermarché, à la maison ou même sur la route. Le système de consigne locale, que soutient la Conserverie et Moutarderie belge, en est un bel exemple. 

Le pas à franchir pour proposer toutes sortes de produits dans une même solution d’emballage est donc moins grand qu'on pourrait le penser à première vue. Une fois que les possibilités du refill ont trouvé leur juste place et mode de fonctionnement, elles soutiennent parfaitement la transition verte dans le monde de l’emballage. »

Green Deal Anders Verpakt : événement de networking dédié au refill

Le 16 octobre dernier, dans le cadre du Green Deal Anders Verpakt, nous avons organisé un événement de networking sur les possibilités et les écueils du refill. Nous nous sommes réunis au siège de Coca-Cola, où nous avons partagé nos connaissances et expériences. En tant que participant au Green Deal Anders Verpakt, Coca-Cola mène également un projet pilote dans le cadre duquel l’entreprise recherche des solutions d’emballage pour des environnements fermés, avec des distributeurs de boissons.

Le refill est-il une alternative intéressante dans la pratique ?

Candice : « Lors de l’événement de networking, différents projets ont été présentés. Les exemples sur le terrain ont clairement montré que le refill est une question complexe, qui doit être adaptée aux conditions de vente spécifiques et aux caractéristiques du produit. Une bonne coopération entre les différents maillons de la chaîne, du développeur technique de produit jusqu'aux détaillant et consommateur, revêt également une grande importance.

Alors que des producteurs de produits de soin, tels qu’Ecover et Mustela, ont fait part de leurs expériences positives, le refill semble moins évident pour les entreprises alimentaires. À cette occasion, Coca-Cola a présenté ses projets pilotes.

Leur équipe de développement mise sur des solutions de refill pour des dizaines de types de boissons. Elle constate que le refill est un parcours d'apprentissage et que cette solution n’est pas encore au point.

Il y a d’énormes différences entre les exigences des appareils qui, par exemple, doivent avoir un débit quasi constant, comme dans un établissement horeca, et ceux qui doivent distribuer des boissons de manière sporadique, comme c’est le cas dans un bureau dans un contexte d’entreprise.

Par ailleurs, fournir un produit d'une qualité aussi élevée que celle d’un produit préemballé représente également un défi. Il est, par exemple, moins facile de proposer en refill une boisson bien pétillante. Ces obstacles n'arrêtent pourtant pas Coca-Cola. En testant différentes versions de distributeurs, ils ont déjà abouti, dans leurs laboratoires de recherche et développement, à une solution appréciable pour les prochains Jeux Olympiques de Paris. Coca-Cola installera ainsi plus de 700 distributeurs de boissons pour contribuer aux Jeux Olympiques les plus écologiques jamais organisés. »

À quoi peut-on s’attendre à l’avenir ? 

Candice : « De l’événement de networking, je retiens en particulier ces points importants et prometteurs : 

  1. La réutilisation fait partie de la solution, mais n’est pas la solution miracle pour rendre les emballages durables.
  2. Les considérations environnementales et économiques déterminent si le refill est approprié ou non.
  3. Une solution de refill doit être adaptée au produit spécifique concerné et au contexte d’utilisation.
  4. Le refill est un parcours d'apprentissage. Il faut du temps et de la recherche pour en faire un système à part entière, efficace. »

Qu’en est-il de la législation ?

Candice : « Je recommande vivement de tenir à l'oeil le cadre légal, car il y a de beaucoup d’initiatives législatives en préparation. La Commission européenne a lancé un projet de réglementation qui fait l’effet d'une tornade dans le monde de l’emballage. La Packaging & Packaging Waste Regulation (PPWR) couvre un champ d'application extrêmement étendu en termes d’emballages.

Elle comporte des dispositions sur la commercialisation de certains produits, les systèmes de collecte, les objectifs de tri et de recyclage, l'utilisation de matériaux recyclés et bien d'autres aspects encore. Une partie importante de la proposition porte sur les objectifs concrets de réutilisation et de refill. 

La proposition actuelle impose, par exemple, un objectif aux producteurs de boissons non-alcoolisées, qui devront proposer 20 % de leurs produits dans des emballages réutilisables à partir de 2030.

Dans notre propre cadre interrégional également, la réutilisation est mise en avant. À la suite du nouvel agrément de Fost Plus à partir de 2024, des obligations de réutilisation sont envisagées pour les membres de Fost Plus. Nous insistons sur le fait qu'il est inacceptable de contourner ainsi les procédures légales adéquates. Fost Plus n'a par essence pas la vocation d'introduire des dispositions légales.

En outre, cette proposition est problématique car elle conduit à une exemption d’entreprises qui, tout en n’étant pas membres de Fost Plus, profitent des facilités et de l’efficacité du système. C’est pourquoi nous plaidons dans notre mémorandum en faveur de conditions de concurrence équitables - sans gold plating - comme ingrédient d'une politique qui a du goût. »