Le potentiel de la consigne digitale

06.02.2023

Juste avant Noël, le gouvernement flamand a décidé de négocier, avec les autres régions, la mise en place d’un système de consigne digitale pour les canettes et les bouteilles en plastique pour mettre fin à leur présence dans les déchets sauvages. Une décision qui a suscité pas mal de remous, mais qui est une bonne chose pour l'industrie alimentaire. Le système sera bientôt testé dans la pratique, mais nous avons interrogé quatre entreprises et... une ambassadrice de la propreté expérimentée sur les raisons pour lesquelles il s'agit d'une solution durable.  

First things first : pourquoi le secteur alimentaire est-il favorable à un tel système digital ? 

Aron Wils, Public Affairs Manager chez AB InBev : « Grâce au sac bleu, nous avons déjà aujourd'hui un taux élevé de collecte de PET et de canettes. Nous récupérons davantage de PET et de canettes que dans certains pays dotés d'un système de consigne classique. Parce qu’un système de consigne digitale nous permet de continuer à nous appuyer sur un système qui fonctionne bien, nous pouvons atteindre des taux de collecte encore plus élevés. C'est un atout important pour l'avenir qui nous permet d'atteindre nos objectifs environnementaux. Nous sommes heureux que le gouvernement flamand donne l'opportunité au secteur de tester cette innovation. »

Eva Lefevre, Director Public Affairs, Communications & Sustainability chez Coca-Cola : « En collaboration avec Fost Plus, nous avons mis au point le système du sac bleu qui garantit une collecte appropriée des emballages à domicile. Nous pouvons dire que c'est un succès. Mais nous comprenons également le défi que représente les déchets d’emballages lors de la consommation « on the go ». Pour ce type de situation, nous voulons trouver une solution positive. Un système dans lequel nous attribuons une valeur aux emballages est la direction à suivre. Nous sommes donc ouverts au fait de tester tous les systèmes, y compris ceux qui reposent sur la force du système actuel. C’est positif de continuer à construire à partir de nos points forts avec l'industrie, les autres régions et les citoyens. » 

Lisez l'opinion d’Ann Nachtergaele « Pourquoi le système de consigne digital vaut-il la peine d’être exploré ? »

Mais un tel système digital est-il vraiment nécessaire ?

Christophe Scharpé, Head of Corporate Affairs chez Spadel : « La consigne digitale est un système moderne et adapté aux technologies d’aujourd’hui. La consommation hors-domicile nécessite beaucoup plus de points de collecte que ce que l’on voit dans les systèmes classiques de nos pays voisins. La consigne digitale offre la possibilité d’avoir plus de points de retour qui sont aussi plus proches du moment où vous consommer, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Imaginez des poubelles intelligentes, pas uniquement dans des bâtiments physiques comme des supermarchés ou des gares, mais aussi des parcs et d’autres lieux publics que vous pouvez accéder à tout moment.

Koen De Maesschalck, Corporate Affairs and Communication chez Colruyt Group : « Avec un système digital, nous évitons aux consommateurs de devoir retourner au magasin avec tous leurs emballages vides. Les Belges ont une consommation très élevée de boissons conditionnées. Nous parlons de près de 5 milliards d'emballages, ce qu’il ne faut pas sous-estimer. Néanmoins, par rapport à la France, les boissons belges sont aujourd’hui plus chères en raison de la taxe sur les emballages et de la TVA plus élevée. Un système de consigne classique ne fera que creuser cet écart. Il suffit de penser aux 10 000 magasins, grands et petits, qui installeraient des distributeurs automatiques. Évitons que les consommateurs aient à payer encore plus et continuent à acheter leurs boissons de l'autre côté de la frontière. De plus, le coût des déchets et des déchets sauvages va également nous retomber dessus. » 

Les consommateurs en tirent-ils également profit ?

Christophe Scharpé : « L’effort que vous devrez réaliser pour ramener votre bouteille ou votre canette sera plus réduit. C’est une bonne chose pour vous en tant que consommateur parce que vous récupérez facilement votre consigne, et pour le secteur car le taux de collecte sera d’autant meilleur ainsi que la lutte contre les déchets sauvages. » 

« Par ailleurs, c’est un système qui se veut évolutif. Nous pouvons envisager del’étendre à d'autres emballages, ce qui n'est pas le cas avec un système classique. On travaille actuellement sur les bouteilles et les canettes, mais on peut très bien imaginer que cela s’applique à l’avenir à d’autres types d’emballages. Cela permet de conscientiser le consommateur sur tous les types d’emballages concernés par les déchets sauvages. », ajoute Koen. 

Les critiques remettent néanmoins en question la faisabilité...

« C'est un nouveau système que nous devons tester. C'est à nous de prouver que cela fonctionne : la critique saine nous permet de rester vigilants », estime Aron Wils (AB InBev). « D'ailleurs, les codes uniques sur les canettes ne sont pas si nouveaux en soi : nous travaillons déjà avec ceux-ci dans des pays d'Amérique latine, d'Afrique et d'Asie, dans le but d'éviter la fraude fiscale par exemple. Cela prendra le temps qu'il faut en Belgique, mais il existe de nombreux exemples qui fonctionnent."

Koen De Maesschalck (Colruyt) approuve : « Nous nous dirigeons de plus en plus vers un monde digital. Vous voyez déjà des codes uniques chez nous aussi, pensez aux emballages des médicaments, de la viande ou même des timbres. Ces codes représentent l'avenir, pour les boissons nous ne les utilisons pas encore, mais cela ne saurait tarder. Soyons clairs : plus vite nous y parviendrons, mieux ce sera pour nous, étant donné que la facture des déchets sauvages passe désormais aussi des communes vers les producteurs. Il n'est donc pas question de manœuvre de retardement ! »

Christophe Scharpé (Spadel) : « Nous ne détenons pas toute la vérité, c'est pourquoi nous allons maintenant bâtir le système ensemble. Nous voulons aussi que les consommateurs nous suivent, et nous désirons voir comment élaborer ce système de consigne digitale de la meilleure façon possible pour répondre à leurs attentes. »  

Et qu’en pensent les consommateurs ?

Cindy Jacobs vit à côté de la réserve naturelle de Gentbrugse Meersen et est une adepte de la collecte de déchets. Elle voit déjà l'utilité d'un système de consigne et la valeur ajoutée d'une dimension digitale : 

« Nous ramassons les déchets depuis des années, notamment le long de certaines routes où il y a peu de maisons et donc peu de contrôle social. À certains endroits, c'est épouvantable ! Nous espérons que le système digital sera mis en place le plus rapidement possible et nous considérons qu'il s'agit d'une solution positive pour donner aux gens un moyen facile de récupérer l’argent de leur consigne. Nous espérons que ce système les dissuadera vraiment de jeter leurs emballages de boisson dans la nature. Son utilisation me semble simple : via une application sur votre smartphone et un sac PMC, dans la camionnette ou tout autre véhicule de transport : cela devrait être facile ! »

La consigne digitale en bref 
•    Comeos, Fevia et Fost Plus, en collaboration avec PwC, ont donc élaboré une étude de faisabilité pour un système de consigne digitale.
•    Avec un système de consigne digital, chaque emballage de boisson se voit attribuer une valeur et un code unique. Ainsi, les consignes sont payées à l'achat etles consommateurs peuvent récupérer, après utilisation, eux-mêmes leurs consignes en scannant leurs emballages vides ainsi que la poubelle appropriée, quels que soient le lieu et le moment de leur consommation. Cela peut se faire soit via un smartphone, soit via un scanner domestique. Cela leur permet de prouver que leurs emballages sont recyclés correctement, soit à la maison dans le sac bleu, soit sur la route dans une poubelle publique (bleue). 
•    L'étude de PwC confirme également que plusieurs solutions dont la géolocalisation, sont possibles, pour lutter contre d'éventuelles fraudes dans le processus.